Nos amies les lettres by Éric Neuhoff

Nos amies les lettres by Éric Neuhoff

Auteur:Éric Neuhoff [Neuhoff, Éric]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Vendredi

Du pain sur la planche. Les embouteillages du vendredi sont bien connus. Jérôme Garcin réclamait un jour un Rosny-sous-Bois pour l’édition. Il en faudrait bien un pour les magazines. Ils se bousculent tous au portillon du week-end. L’ensemble est passionnant. Vendredi est le jour du poisson et des journaux en couleurs.

L’EXPRESS

Journal bien fait. On y a eu l’intelligence de confier Adieu Volodia à Danièle Heymann, qui fut longtemps, qui est peut-être toujours responsable des variétés. Le Monde (n’est-ce pas, Poirot ?), l’Observateur (pas vrai, Josselin ?) n’eurent pas de ces pudeurs. Les compliments sur L’Express vont-ils s’arrêter là ? Il y a un problème Express. Tout le monde sait que L’Express, c’est Rinaldi, point final, mais personne n’ose le dire. Matthieu Galey, bien sûr, ça n’est pas si mal, ce parfum de Charentes, ce jeune homme qui a connu Chardonne, qui lit les livres comme il va au théâtre, en spectacteur, en gourmand qui prend des mines entendues. On lui reproche d’avoir fait la fine bouche devant Pascal Jardin, à un moment où celui-ci avait un pied dans la tombe. Effectivement, ce sont des choses qui ne se font pas, même si La Bête à Bon Dieu était tout sauf impérissable. Il y a eu Christian Combaz. Celui-là est passé comme une étoile filante, juste le temps de dégommer Michel Déon, ce qui paraît lui avoir été fatal. Non, non, nous n’en démordrons pas, nous scanderons son nom sous les fenêtres de Jimmy Goldsmith : « Rinaldi ! Rinaldi ! »

Angelo Rinaldi, bon. Au fond, cet homme est bien à plaindre. Il ne saura jamais exactement ce qu’on pense de ses romans. Ses confrères ont bêtement peur de lui. Peut-être que tout ce que demande Rinaldi, ce sont des gifles, qu’on lui signale ses bourdes, qu’on souligne en rouge les chapitres qui feront bâiller le lecteur, qu’on lui dise qu’à la fin, c’est un peu agaçant, cet Angelo romancier17 qui a une trouille bleue que le critique Rinaldi ne lui règle son compte. Pour Les Jardins du consulat, il avait eu droit à l’artillerie lourde. La corporation avait sorti le grand jeu. Les tribunes officielles étaient bondées, un 14 Juillet sous Mitterrand, que des invités triés sur le volet : Xenakis, Nourissier (« un Visconti corse »), Claude Roy qui cette semaine-là avait délaissé sa réserve de dissidents russes, Amette qui commit la maladresse insigne de le comparer à Mauriac (Rinaldi s’était pincé les narines devant la Pléiade de ce dernier), Brenner, et tutti quanti. Relevons les noms propres qui parsemaient tous ces articles, ça n’est pas triste : Proust, Henry James, Mauriac, Musset, Buñuel, Goya, Retz, Loyola, Saint-Cyran, Musil, Lampedusa, Visconti, Daumier, Magnasco, La Rochefoucauld, Claudel. Pas de doute, on avait convoqué du beau linge à son chevet. Il n’y est pour rien. Il n’a rien demandé. Les critiques, transis de respect, pensant surtout à leur prochain livre à eux, déposent ces offrandes dans la pyramide du pharaon qui considère ce manège d’un œil brillant de malice. Quand même, il y aurait eu un clash, un couac dans le concert.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.